Et à regarder sa photo, vous comprenez tout de suite que ça n'est pas vrai.

Mario Lucio est chanteur, pas clown. Mais il est également Ministre capverdien de la Culture. Ce qui ne l'empêche pas d'être un grand enfant et de faire des rêves d'enfant : Monsieur Loyal, les lions, les trapézistes, le Clown Blanc, le président de la Républiiiiiique, les tartes à la crème, tout ça il en rêvait.

Il en rêvait alors il l'a fait, en annonçant la semaine dernière la création du Cirque National du Cap-Vert, qui devrait englober une compagnie (à créer) et une école du cirque. Il y a bien deux-trois clowns et un magicien à Praia qui arrondissent leurs fins de mois en animant des anniversaires, il y a également une demi-douzaine de jeunes sachant jongler sur des échasses, ça n'est pas grand chose mais il n'en fallait pas plus à notre homme-éternellement-vêtu-de-blanc pour transformer tout ça en Cirque National. La mauvaise nouvelle c'est qu'on va probablement voir débouler d'Europe tous les jongleurs à dreadlocks, et ça, alors ça, ça c'est pas cool.

Mario Lucio l'a annoncé il y a quelques jours, il n'assumera plus de fonction politique dans le prochain gouvernement issu des élections législatives du 20 mars 2016, il retournera à la vie d'artiste. Avec probablement la satisfaction du travail accompli, car il faut reconnaître qu'il a mis une certaine énergie à réanimer un ministère jusque-là un peu en sommeil. À son crédit également, la création d'un réseau de musées nationaux, le lancement d'événements culturels comme l'Atlantic Music Expo (marché professionnel et international de la musique), Feira da Palavra (Fête de la Parole) ou Fonartes (foire nationale de l'artisanat). 

Cette énergie, c'est justement ce que ses détracteurs lui reprochent, en le taxant de folie des grandeurs et de précipitation : quand il rencontre cinq musiciens, il invente un Orchestre National du Cap-Vert (composé à plus de la moitié d'instrumentistes portugais), s'il assiste à un spectacle de danse, il crée aussitôt le Ballet National du Cap-Vert. Avec des lendemains parfois douloureux, puisque le budget du Ministère n'est pas illimité.

Mais il reste encore deux bonnes grosses semaines à Mario Lucio pour réaliser ses rêves, un agent infiltré au Ministère a pu nous envoyer la liste de projets qui seront annoncés dans les prochains jours:
- Opera National du Cap-Vert
- Parc Zoologique du Cap-Vert (avec éléphants, lions, hippopotames et des ouistitis parce que c'est rigolo les ouistitis)
- Studios Cinématographique du Cap-Vert
- Institut National du Punk-Rock capverdien
- Conseil Supérieur du Zouk et du Cabo Love
- Haute Autorité du jeu d'Ouril
- Festival International de la Bande Dessinée Créole
- Salon de la Haute-Couture Capverdienne
- Biennales du Funana
- Rencontres Nationales du hip-hop Kriolada
- Bibliothèque Nationale des mangas japonais naturalisés capverdiens
- Académie Nationale des Telenovelas
- Nuits Créoles de la Publicité
- Journée d'Hommage à Ti Lobo
- Journée d'Hommage à Chibinho
- Organisme d'Etat du Recyclage des sandales en Sublimes Oeuvres d'Art
- Observatoire du Jeu Vidéo capverdien
- Journée Internationale du Kizomba 100% Capverdien
- Musée Intergalaxial du Pano d'Obra

Vous le savez peut-être, le Cap-Vert étant composé d'îles, la loi 26F-167 du 30 janvier 1867 nous autorise à parler d'archipel. Et qui dit archipel dit port. Et comme il y a effectivement bien plusieurs ports au Cap-Vert, ça prouve bien que c'est un archipel. Des ports, on en compte pas mal mais ça sera plus facile avec les doigts des mains : Praia (Santiago), Palmeira (Sal), Sal Rei (Boa Vista), Mindelo/Porto Grande (São Vicente), ça nous en fait quatre. Il en existe d'autres mais ils sont plus petits et n'enregistrent pas un trafic significatif de containers.

Or ce sont les containers qui nous intéressent aujourd'hui. Enfin pas nous, pas spécialement nous (à la limite si on me demandait mon avis pour une fois dans ma vie, je serais bien incapable de mentir, je le dirais tout net les containers ne m'intéressent pas du tout), ils intéressent les bretons - et tout le monde sait que les Bretons ne sont pas des gens comme nous.

Il y a peut-être une certaine forme d'exagération dans ce qui a été dit, tous les Bretons ne s'intéressent pas forcément aux containers, ça n'est pas systématique, et comme j'ai horreur des raccourcis, on va le dire autrement : il y a UN Breton qui se passionne pour les containers au Cap-Vert, il en parle toute la journée, il en rêve la nuit, une véritable obsession.

Et ce Breton, vous le connaissez, c'est Vincent Bolloré. Vous en avez beaucoup entendu parler depuis qu'il a pris le contrôle du groupe Canal Plus, mais il a de très nombreuses activités, en particulier les activités portuaires et en particulier en Afrique où il contrôle un nombre impressionnant des plus grands ports du continent. Et d'après la presse capverdienne, il serait en passe d'obtenir la concession pour 20 ans des quatre grands ports de l'archipel.

Chose étonnante, la décision devrait être prise et annoncée à la fin du mois de février... À trois semaines des élections législatives à l'issue desquelles un nouveau gouvernement sera nommé, et il se murmure que l'opposition est donnée gagnante. Ça sent bizarre, hein?

À celles et ceux qui douteraient de la réputation de Mindelo, connue pour être une ville qui aime faire la fête...

On s'amuse, on s'amuse mais je vois bien que vous êtes inquiets. Ne mentez pas je le sais, vous êtes inquiets, la lecture des dernières news internationales vous plonge dans une crise anxiogène des plus inquiétantes, vous êtes à deux doigts d'une panique incontrôlée, juste avant l'hystérie paralysante. Et tout ça à cause de ces fameuses autoroutes électroniques sur lesquelles des informations pas toujours très exactes roulent à toute allure les cheveux au vent sans trop savoir où elles vont, ce qui nous fait une métaphore doublée d'un euphémisme.

Vous les connaissez comme moi, les journalistes aiment bien planter des petits drapeaux à la surface de leur mappemonde globalisée, et cette semaine ils nous en ont planté un rouge écarlate sur les îles du Cap-Vert : le débarquement avait eu lieu, l'archipel venait d'être envahi par des hordes de moustiques porteurs du virus Zika et d'un couteau entre les dents. Pour les journaux ça tombe très bien, la position géographique des îles du Cap-Vert est très symbolique d'une menace, en plein milieu entre l'Amérique du Sud et l'Europe. Tiiiindiiin, tremblez, tous aux abris, les moustiques aux longues dents sont en train d'arriver par chez vous.

Sauf que.

Sauf que évidemment la réalité est un tantinet différente. D'abord parce que le virus Zika est arrivé au Cap-Vert depuis un petit moment déjà, plus exactement au mois d'octobre, voire fin septembre. C'est-à-dire à la fin de la période des pluies, quand les moustiques trouvent de l'eau un peu partout, en tout cas plus facilement que le reste de l'année quand il n'y a pas une goutte de pluie.

Il y a eu alors un très grand nombre de cas, il en avait été question ici et à l'époque effectivement c'était plutôt inquiétant, principalement pour les habitants de Santiago et encore plus spécifiquement pour ceux qui habitent Praia. Avec plusieurs milliers de cas, on avait alors atteint en novembre le point le plus haut de l'épidémie : à l'époque, les journalistes européens s'en fichaient un peu et s'intéressaient davantage aux piqûres par kalachnikov, ça se comprend, tout est pardonné.

Depuis, l'archipel est redevenu sec, quand il pleut c'est du crachin, il tombe six gouttes pendant trois minutes: autrement dit les moustiques sont à la peine, ils la ramènent nettement moins - quand ils trouvent encore la force de piquer, c'est tout mou, on aurait presque envie de les encourager tant le spectacle de leur dard mollasson s'enfonçant pitoyablement dans le derme est pathétique, vas-y Momo tu peux y arriver. De plus, des campagnes de désinsectisation et d'information ont été menées pour éliminer les foyers où les moustiques pouvaient jusque-là faire la fête. Du coup et par voie de conséquence, le nombre de patients probablement infectés par le virus Zika a chuté de manière plus que drastique. On dit "probablement infectés" parce qu'on n'a pas forcément toujours les moyens de prouver par des tests qu'il s'agit bien de Zika, on le déduit à partir des symptômes, ce qui aurait plutôt tendance à sur-estimer les cas qu'à les sous-estimer.

Pour résumer: au moment précis où l'archipel respire mieux en constatant qu'il n'y a plus que quelques cas (83 cas du 18 au 24 janvier contre près de 800 pour la pire semaine de novembre), les journaux et sites d'information le pointent du doigt en le présentant comme un danger et comme une porte d'entrée pour le virus en Afrique et possiblement en Europe.

À vrai dire, il reste un nombre qui justifie une certaine préoccupation, c'est celui du nombre de cas détectés à São Filipe sur Fogo : alors que le nombre de contaminations sur Praia a été réduit très fortement, São Filipe présente une certaine résistance - et ce alors que le nombre de cas a diminué de moitié. Sur les autres îles, on compte très peu de contaminations et il s'agit très certainement de cas importés (des gens qui ont séjourné sur Santiago ou Fogo).

Cela dit, le gouvernement annonce privilégier la vigilance et multiplie les campagnes d'information. Si vous devez venir au Cap-Vert dans les prochains jours et prochaines semaines, munissez-vous de répulsifs anti-moustiques - que vous pourrez offrir avant votre retour chez vous. Et rassurez-vous, on ne vit pas sous la menace permanente des moustiques, encore moins en cette période sèche.

Mise à jour du 15 février: la tendance à la forte baisse se confirme. Seuls 67 cas ont été enregistrés pendant la première semaine de février, dont 50 à São Filipe sur l'île de Fogo, 7 à Praia, 5 dans le reste de Santiago, 3 dans l'intérieur de Fogo et 2 à Boa Vista.

Ci-dessous, quelques graphiques de bon aloi à faire glisser par un mouvement latéral de votre souris ou de votre doigt (s'il n'a pas encore été rongé jusqu'à l'os par un moustique dévoreur de chair).

Oh les Françaoui! Eh la diaspora parisienne! Il paraît que vous avez froid? On nous dit qu'il ne fait pas beau? Qu'est-ce que vous diriez de vous réchauffer aux rayons du soleil du Cap-Vert? Mieux, si je vous en donne deux pour le prix d'un, deux soleils radieux et bouillonnants d'énergie, ça vous dit toujours, vous êtes partants?

Lura et Elida Almeida seront sur la scène de l'Alhambra ce jeudi 4 février à 20h30, suivez ce lien pour en savoir plus sur le concert : http://www.alhambra-paris.com/fiche.php?id=738

Amenez vos plus belles lunettes noires et votre crème solaire, les deux artistes vont vous réchauffer !

On cause, on cause, et on en oublierait presque le Carnaval, alors qu'il pointe méchamment le bout de son nez puisque les festivités commenceront dès après-demain, eh oui, déjà, avec le défilé des écoles maternelles - pas forcément le truc le plus incroyablement inoubliable, puisque ça consiste à faire défiler des bambins entre deux rangées d'instituteurs, d'employés des maternelles et surtout des parents.

Pour ainsi dire, on ne voit rien, on essaie bien de deviner ce qui se passe derrière cette muraille mobile, mais tout ce qu'on voit ce sont juste des centaines de parents essayant tant bien que mal de rassurer chacun leur Kevin et de le remotiver alors que Kevin est en plein down, comprenez-le à son âge il n'arrive pas à se faire à l'idée qu'il n'est rien de plus qu'un des 300 Spiderman alors que jusque-là il se croyait unique.

Mais je vois bien que vous avez envie de vous amuser et de vous trémousser joyeusement sur une ritournelle tropicale, je vous propose donc cette "Estrela da Marinha" tirée du nouvel album "Quinta" de Mariana Ramos.

439.000.000

Pedro Miguel Amakasu Raposo de Medeiros Carvalho - oui c'est son nom. Une coopération qui s'est notamment traduite par le financement et la construction de bâtiments ou d'infrastructures.

Et demain, le miyion jaune du jour sera 314 - car c'est en miyions de dollars le montant de la coopération japonaise au Cap-Vert pour la même période. Bon ben finalement, pas de miyions demain, vous savez déjà tout, je ne sais pas tenir ma langue.

Depuis déjà quelques semaines, les préparatifs du Carnaval de Mindelo ont commencé: dans les quartiers, tous les soirs, des milliers de danseuses et danseurs apprennent leurs chorégraphies, les groupes de batucadas (percussions) martyrisent leurs tambours tandis que des petites mains vont et viennent pour assembler les costumes faits de tissus brillants, de perles, de plumes et d'accessoires. Dans le plus grand secret, les groupes n'arrêtent pas de souder, de peindre, de modeler pour préparer les chars qui ne seront dévoilés que le jour J, le mardi du Grand Défilé.

Pour vous mettre un peu dans l'ambiance, voici une vidéo regroupant des musiques du Carnaval ; pas celles des groupes officiels, mais celles chantées ou hurlées dans les défilés populaires. En janvier, chaque dimanche, les Mandingas sont de sortie et entraînent dans leur sillage des centaines voire des milliers de joyeux participants, dans une ambiance festive voire déglinguée.

Ces musiques sont de Tucim Bedje ("la vieille couenne"), un groupe formé par des habitants du quartier populaire de Rbera Bote qui ont pris pour habitude d'animer le Carnaval de Mindelo. Le clip intègre plusieurs des chansons du groupe, qui rend hommage aux fameux Mandingues de Rbera Bote!